L’île de Pâques, avec le Chili ou la Polynésie ?

Pour chaque pays visité, on fait une sélection de photos (environ 300, soit 10% !), et on en fait un album papier. Ces albums sont vérifiés par la boutique de photos en face de chez nous, et nous attendent pour notre retour.

Lorsqu’on ne passe que quelques jours dans un pays, comme au Vietnam ou en Thaïlande, on regroupe ces photos avec celles d’un autre pays proche (respectivement le Cambodge et la Birmanie).

En Polynésie, on a bien compris que le peuplement de l’océan pacifique s’est fait à partir d’une même origine. Le Triangle Polynésien regroupe toutes les îles situées entre Hawaï, la Nouvelle-Zélande et l’île de Pâques ! La proximité des langues et des coutumes contraste avec les immenses distances qui séparent ces îles.

Poussés par la surpopulation, la faim ou les guerres, des familles entières partaient sur des espèces de catamarans, avec leurs poules, leurs cochons et même des graines pour coloniser de nouvelles terres. Ces merveilleux navigateurs pouvaient parcourir des milliers de kilomètres en se repérant aux étoiles, et retrouver une île aussi minuscule que Rapa Nui (l’île de Pâques, qui mesure 30 km au plus large) après des semaines de navigation !

La surface qu’ils ont couverte sur le globe ferait pâlir d’envie nos grands conquérants européens !

La minuscule île de Pâques se visite en trois ou quatre jours, école pour les enfants comprise.

Pour les photos, Rapa Nui semble donc devoir être ajouté à l’album de Polynésie et non au Chili auquel elle est rattachée depuis la fin du XIXème siècle.

Mais une fois arrivés sur place, on comprend que la culture polynésienne a presque totalement disparue.

Les premiers arrivants n’ont pas réussi à faire pousser ici leur arbre de prédilection pour construire leurs bateaux. Ils ont tant bien que mal maintenu en état les bateaux avec lesquels ils étaient arrivés, pour garder des relations avec les îles Marquises (à 3600 km !) pendant trois siècles. Puis, faute de bateaux, ils sont restés isolés pendant environ mille ans !

Sur cette île ventée, avec peu de ressources, la population a culminé à 15 000 habitants avant de décliner. Entre l’arrivée des premiers occidentaux au XVIème siècle et le milieu du XIXème, les pascuans ont été décimés par les guerres et les maladies pour descendre à 6000. Une razzia péruvienne en 1863 a emporté toute la classe supérieure de l’île (dont les prêtres, dépositaires des connaissances orales) pour les réduire en esclavage. À leur retour, la centaine de survivants a apporté un nouveau lot de maladies qui a encore plus décimé la population.

Au final, il n’est resté que 400 individus ! Pire, Rapa Nui avait inventé la seule écriture du triangle Polynésien, et le dernier lecteur de ces tablettes est mort au début du XXème siècle, sans que quiconque ne reprenne ses connaissances. Cette écriture reste aujourd’hui indéchiffrable.

L’île de Pâques est donc aujourd’hui une province Chilienne. On y parle un espagnol mâtiné de quelques mots d’origine tahitienne.

Faudra-t-il donc faire un album photo « Île de Pâques & Chili » ?

Une fois encore, le hasard est venu nous offrir une jolie rencontre. Dans notre hôtel loge une jeune femme, pascuanne, le temps que les travaux de sa maison soient finis. Comme elle est guide, c’est naturellement avec elle que nous avons visité l’île.

Et grâce à elle, nous avons compris combien la culture pascuanne est restée forte ! Son père descend du clan qui sculptait les Moaïs, ces géants de pierre (jusqu’à 10 mètres de haut), dont on ne sait toujours pas comment on déplaçait leur 70 tonnes sur des dizaines de kilomètres.

Véritable puits de connaissances, mêlant à la fois decouvertes archéologiques et récits ancestraux, Noe nous a partagé sa passion pour la culture Rapa Nui. On en arrivait à sentir son « mana », l’énergie que les anciens conservaient dans leurs énormes statues.

Devant les inconcevables efforts déployés pour sculpter (avec des outils de pierre !), transporter et lever ces blocs de plus en plus gros, et dont l’île est couverte de vestiges brisés pendant l’une ou l’autre de ces étapes, on ne peut que ressentir la force, le mana toujours vivace, de cette culture qu’on croyait éteinte.

La beauté si particulière des statues abandonnées et à moitié enterrées dans leur carrière, nous laisse bouche bée. On imagine la surprise de Pierre Loti lorsqu’il est venu ici à la fin du XIXème.

L’isolement de l’île à obligé ses habitants à développer une culture unique. Personne n’est venu leur dire que leurs projets dépassaient toute mesure (un Moaï inachevé dans la carrière mesure 21 mètres et aurait pesé 140 tonnes!).

Rapa Nui, comme il faudrait l’appeler, plutôt que l’île de Pâques, mérite donc un album photo à part, tant ce confetti perdu au milieu des eaux jouit d’une identité unique, puissante, sans aucune comparaison possible avec sa Polynésie d’origine ni son Chili d’adoption.

5 réflexions au sujet de « L’île de Pâques, avec le Chili ou la Polynésie ? »

  1. Rapa Nui mérite un album exclusif. Bien que l’on trouve plein de reproductions en pierre ou en bois de Moaïs au Chili, la culture pascuanne était unique et n’a rien à voir avec la culture amérindienne.
    Profiter bien de votre périple
    Bises à tous.

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